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DÉSOLATIONS DE DAVID VANN

 L'Article


David Vann

Au plein cœur de l’Alaska, Irène vit avec Gary. Ils viennent de prendre leur retraite. Gary a pour projet de construire une cabane sur une île isolée de tout, Caribou Island, afin qu’ils puissent y vivre tous les deux. Mais au fur et à mesure que la construction avance, l’hiver se rapproche, les relations du couple se détériorent et Irène est prise de terribles migraines. Leurs enfants sont témoins de cette progressive descente aux enfers.

Deux ans après un premier roman qu’il avait mis plus de dix ans à écrire, le remarquable Sukkwan Island, David Vann revient cette fois-ci très vite avec Désolations. Si l’on peut voir des ressemblances assez nombreuses avec son roman précédent, celui-ci paraît à la fois plus ambitieux dans la forme mais peut-être moins dans le fond. Cette histoire se passe dans le même genre de paysage que son livre précédent. L’Alaska, avec sa nature omniprésente, son climat difficile et ses hommes au tempérament ombrageux, devient presque un personnage à part entière de toute l’histoire tant il semble avoir une influence directe sur les personnages et notamment leur psychologie.

Parce que c’est bien d’un livre sur les comportements humains dont il s’agit ici. Les relations au sein de différents couples, et notamment ce couple de retraités, mais aussi celles qui peuvent exister avec les enfants sont disséquées. Ce n’est pas la vision la plus optimiste de l’amour, c’est le moins que l’on puisse dire tant toutes les histoires deviennent de plus en plus sombres. Alors que la première moitié du livre présente un nombre plutôt important de personnages et de situations (contrairement donc, à Sukkwan Island), peu à peu, l’auteur resserre son intrigue sur les véritables protagonistes, ce qui renforce le côté oppressant de ce livre. Le drame se sent dès le début mais l’auteur a un vrai talent pour le rendre toujours plus proche et finalement réel.

Il y a aussi un vrai style David Vann, assez reconnaissable, fait de phrases assez courtes, d’un mélange pas toujours évident à démêler de narration et de dialogues et surtout d’une volonté de toujours aller sonder au maximum les âmes des personnages. Peut-on parler de cet écrivain comme d’un fils spirituel de l’immense Cormac McCarthy ? Tant les sujets traités, la noirceur ambiante qu’un certain style épuré (surtout pour le McCarthy de La Route) permettent de dire que David Vann reprend en quelque sorte le flambeau du grand roman noir américain. On attend tout de même toujours le retour du maître, absent depuis la publication de La Route mais si Vann continue de n’écrire que des livres d’une telle force, la transition pourra se faire en douceur. Ce qui est certain, c’est qu’un grand nom de la littérature est en train de naître.

« Elle laissa Gary découper la fenêtre, un trou béant dans le mur qui deviendrait leur seule ouverture sur le monde extérieur, symbole évident du rétrécissement de leur existence »

Si vous le prenez entre les mains, vous aurez du mal à lâcher ce livre, tant il est prenant. Sombre et dur, il met parfois mal à l’aise mais est magnifié par un style d’écriture assez incroyable, en adéquation totale avec le fond. Lisez-le seulement si vous n’allez pas trop mal…

Désolations




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