L'Article
Sur plus de quatre-vingt ans, on suit le destin de Younes, jeune enfant né dans la campagne algérienne et qui verra sa vie bousculée par divers évènements : le fait qu’il soit recueilli par son oncle et qu’il déménage dans un village où une très forte amitié le liera à d’autres enfants, l’arrivée d’Emilie, jeune femme qui va bouleverser ce groupe d’amis, la mort de ses êtres proches. Et tout cela dans le contexte de la deuxième guerre mondiale puis de la volonté du peuple algérien de revendiquer son autonomie, qui va aboutir à une deuxième guerre, encore plus violente pour le peuple algérien…
Ca faisait quand même plus qu’un certain temps que ce livre trainait dans la pile des romans à lire. J’ai en effet enchaîné trois Yasmina Khadra il y’ a quatre ou cinq ans et j’avais trouvé dans l’ensemble que c’était pas mal du tout. Quand j’ai vu qu’il y allait avoir tout bientôt (elle sort demain) une adaptation au cinéma, je me suis dit qu’il fallait vraiment que je le lise avant. En très peu de temps, c’était réglé car c’est vraiment le type de livre qui se parcourt assez facilement, et cela en grande partie parce qu’on a envie de connaître la suite des aventures du héros : Younes / Jonas.
L’ambition du livre est de raconter à travers la vie d’un tout jeune garçon qui deviendra un homme les évolutions majeures qu’a connu l’Algérie au cours du Vingtième Siècle. L’histoire commence dans le début des années 30 pour se finir aujourd’hui avec, tout de même, plusieurs passages qui sont plus mis en lumière, comme la période de la Deuxième Guerre Mondiale et, surtout, celui de la guerre d’indépendance de l’Algérie. Le personnage central traverse tous ces évènements de façon assez étrange puisqu’il a été recueilli par son oncle qui lui offre alors une éducation à l’occidentale et les amis qu’il va se faire sont tous différents dans le rapport qu’ils entretiennent avec cette terre algérienne. Il va se retrouver tiraillé entre deux feux, entre deux cultures sans jamais vraiment pouvoir s’en sortir. Là-dessus se rajoute en plus une histoire d’amour terrible qui va déchirer la troupe d’amis que l’on pensait inséparable. C’est l’arrivée d’Emilie qui va tout chambouler et mettre une difficulté supplémentaire dans l’appréhension des évènements pour Jonas.
Cela fait tout de même un peu beaucoup et ce que l’on peut reprocher principalement à ce roman. Il y a vraiment trop de coïncidences, trop d’évènements qui s’entrechoquent, et trop, c’est trop… En fait, presque chaque chapitre pourrait avoir son propre livre tant le foisonnement est important, parfois à la limite de la surabondance. De plus, ce n’est globalement pas le style de l’auteur qui permettrait de sortir de ce côté un peu too much. il a en effet une tendance naturelle à en rajouter pas mal, tant dans l’hyperbole, le vocabulaire utilisé que dans les structures de phrases, parfois un peu trop alambiquées. C’est un peu dommage car, en faisant plus simple, il est aussi tout à fait capable de transmettre des émotions. Parce que ce livre en véhicule tout de même, malgré les défauts cités précédemment et c’est pour cela que l’on ne peut pas dire qu’il est raté, loin de là.
« … Puis il y eut Émilie.
La première fois que je l’avais vue, elle était assise dans la porte cochère de notre pharmacie, la tête dans le capuchon de son manteau, les doigts triturant les lacets de ses bottines. C’était une belle petite fille aux yeux craintifs, d’un noir minéral. Je l’aurais volontiers prise pour un ange tombé du ciel si sa frimousse d’une pâleur marmoréenne ne portait l’empreinte d’une méchante maladie.»
Grande fresque au côté fortement épique, ce livre vaut plus pour la façon dont est montrée l’évolution de ce qui va devenir un pays que pour l’histoire même de ce Younes, à qui il arrive trop de choses pour que l’on s’y attache vraiment. Le principal problème de ce roman repose dans le fait que chaque chapitre mériterait un roman propre. Mais, tout de même,Ce que le jour doit à la nuit recèle quelques jolis passages. Mais, après ce que j’ai lu, j’ai un peu peur pour l’adaptation au cinéma…