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ILS VIVENT LA NUIT DE DENNIS LEHANE

 L'Article


Dennis Lehane

Joe est le petit frère de Danny Coughlin que l’on avait découvert dans un pays à l’aube. Mais contrairement à son frère, c’est plutôt du mauvais côté qu’il a sombré puisqu’il est devenu un petit truand. Au fil de ses arrestations, de ses rencontres mais aussi de ses amours, on va le suivre à Boston, en Floride et même à Cuba. Il va à la fois développer un empire mais aussi connaître une vie pour le moins dangereuse.

Un livre qui débute par une citation tirée de Méridien de Sang de Cormac McCarthy ne saurait être mauvais, c’est la première réflexion que l’on peut se faire en ouvrant cet ouvrage. Surtout que ce Ils vivent la nuit commençait gentiment à se faire attendre. Pour moi qui suis un grand fan de l’auteur et de tout ce qu’il a pu écrire, la sortie en français (je l’ai commencé en anglais il y a trois mois mais je ne suis pas allé bien loin) de la suite du très grand Un pays à l’aube était nécessairement un évènement d’importance. Et si c’est un vrai bon livre, je ne peux m’empêcher de ressentir une certaine frustration après avoir fini ce livre. Ca se lit bien, c’est dans l’ensemble plutôt prenant mais il manque quelque chose pour en faire un vrai très bon livre. Il faut dire que l’auteur a placé la barre tellement haut avec son livre précédent qu’il semblait compliquer de réussir un roman qui dégagerait une puissance similaire.

Ce que l’on peut déjà dire, c’est que Ils vivent la nuit est une fausse suite puisque ça démarre dix ans plus tard et que les personnages principaux du premier roman sont complètement évacués (Danny ne revient qu’à un seul moment, mais son importance est plus que minime) et on se concentre bien sur la vie de Joe. Alors que Un pays à l’aube se déroulait sur un temps très court mais en s’intéressant à plusieurs personnages (et notamment Danny et Luther, le nouveau roman de Lehane se déroule sur une période plus longue et c’est bien la vie de Joe (que l’on entrevoit dans Un pays à l’aube) qui nous est contée. Trois parties sont clairement définies qui correspondent à autant de périodes marquées par des évolutions géographiques (Boston, Floride, Cuba). Car c’est peut-être la nouveauté la plus importante de ce livre : Dennis Lehane sort de sa ville natale et creuset de tous ses précédents romans (il le faisait tout de même aussi dans Sacré, d'ailleurs aussi en Floride...). Le point de départ du roman s’y trouve mais c’est finalement bien plus au sud, à Ybor City, que le véritable cœur de l’histoire va se dérouler.

Ils vivent la nuit est une sorte d’étude qui montre l’ascension progressive, à travers des rencontres, des coups de force, des coups de bluff et une certaine forme d’intelligence d’une petite frappe de Boston à baron de nombreuses actions illicites en Floride. C’est en ce sens une vraie plongée dans un monde parfois fantasmé et, de mon côté en tout cas, relativement peu connu. Mais parce que Lehane reste Lehane, il y a toujours une force intérieure profonde qui anime ses personnages et, comme souvent, c’est l’amour qui est ici au centre de beaucoup d’enjeu et qui, on s’en rendra compte assez vite, détermine beaucoup de choses dans sa vie. Ce que je reproche à ce livre est son manque de densité. En effet, sur les neuf années qui sont contées, on trouve beaucoup d’ellipses, parfois presque un peu gênantes car on voudrait en savoir plus sur telle ou telle chose. La fin, notamment, semble un peu bâclée, comme si l’auteur n’avait plus vraiment d’idées. Mais Lehane reste Lehane et son style est tellement génial qu’il réussirait à m’intéresser à l’histoire d’un portefeuille…

« Quelques années plus tard, sur un remorqueur dans le golfe du Mexique, Joe Coughlin verrait ses pieds disparaitre dans un bac de ciment frais. Pendant que les douze gangsters embarqués avec lui attendraient d’être assez loin en mer pour le jeter par-dessus bord, il laisserait son regard se perdre dans les flots écumeux à la poupe tout en écoutant le moteur ahaner. Il lui viendrait alors à l’esprit que presque tout ce qui s’était produit de notable dans sa vie – en bien comme en mal – avait été mis en branle ce matin-là, lorsqu’il avait croisé pour la première fois la route d’Emma Gould. »

Beaucoup moins dense et fouillé que le livre dont il est la suite, ce Ils vivent la nuit vaut quand même pour la description du monde des malfrats lors de la prohibition. On a envie de suivre ce personnage assez singulier qu’est Joe Coughlin, et c’est pour le moins important. Maintenant, c’est à Ben Affleck d’en réussir l’adaptation, puisque paraît-il c’est le prochain projet du nouveau nabab d’Hollywood. En tout cas, il a du matériau…

Ils vivent la nuit




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