L’Angleterre est de retour en demi-finale après vingt-huit ans d’attente, ce qui semble juste énorme pour le pays qui a inventé ce sport. Pour la Croatie, c’est également une réapparition à ce niveau de la compétition, vingt ans après cette mythique demi-finale perdue face à la France. Entre deux équipes qui ont plutôt bien géré leur premier tour mais semblent un peu plus en difficulté lors des matchs à élimination directe, le résultat paraît relativement indécis.

Le match :

Ça commence fort puisqu’après cinq minutes de jeu, Luka Modric fait une faute sur Dele Alli à une vingtaine de mètres de la surface, ce qui donne l’occasion à Kieran Trippier de montrer l’étendue de son talent sur coup franc direct. Car même si Subasic ne semble pas très réactif sur le coup, la frappe du jeune latéral de Tottenham est splendide. Les Anglais prennent donc la main sur le match et ce n’est pas la première mi-temps des Croates qui peut les inquièter. Visiblement fatigués, les joueurs des Balkans ne parviennent pas à mettre leur jeu en place, notamment parce que Rakitic et surtout Modric, leurs deux rampes de lancement, sont bien mis sous l’éteignoir par le milieu anglais. Les Three Lions auraient même dû rentrer à la mi-temps avec plus d‘un but d’avance tant ils dominent dans tous les secteurs du jeu, mais sans complètement pousser afin de tout faire pour marquer une deuxième but qui les mettrait à l’abri. Le début de deuxième mi-temps recommence sur un rythme identique, avec une Angleterre qui semble contrôler sans proposer grand-chose et une Croatie qui n’a visiblement pas les armes pour faire plus. Tout change à vingt minutes de la fin sur un centre de Vrsaljko où Perisic passe devant Trippier et Walker pour mettre un coup de pied assez acrobatique et qui termine au fond du but. A partir de là, les Anglais vont peu à peu se liquéfier et les Croates retrouver de l’allant. Une frappe sur le poteau de Perisic quelques minutes plus tard rappele que le rapport de force semblait s’être inversé. Au cours des prolongations, malgré une grosse occasion anglaise (tête de Stones repoussée sur sa ligne par Vrsaljko), on sent des Anglais de plus en plus tendus et des Croates revigorés. C’est finalement sur un oubli assez incompréhensible de la défense des Three Lions que la Croatie marque le but qui l’envoie en finale.

Pour l’Angleterre, c’est la fin d’une épopée qui avait fait naître d’immenses espoirs au pays. Mais ce n’est pas si illogique car, si on observe bien leur parcours lors de cette Coupe du Monde, ils n’ont finalement pas montré énormément de choses dans le jeu. Neuf de leurs douze buts sont venus de coups de pied arrêtés et ils n’ont jamais su complètement contrôler un match contre de grosses équipes (ils ne passent pas loin de la correctionnelle lors de la prolongation face à la Colombie). Cela vient selon moi principalement d’un milieu de terrain qui manque de caractère. Henderson, Alli ou Lingard sont de bons joueurs mais ils n’ont jamais été en mesure de peser sur les matchs. Et Harry Kane (qui finira sans doute meilleur buteur de la compétition) a été complètement absent lors des matchs couperets, tout comme un Raheem Sterling qui a repris son rôle préféré de « poulet sans tête » qu’il semblait avoir délaissé cette saison en club. Du côté croate, c’est une aventure exceptionnelle pour cette génération dorée, et ceci à de nombreux points de vue. D’abord parce que la Croatie reste un petit pays (quatre millions d’habitants), fou de sport, et qui parvient à être la treizième nation à atteindre le stade de la finale. Mais c’est surtout leur parcours qui est bluffant puisque c’est la première équipe de l’histoire à remporter trois matchs en prolongation d’affilée, dont deux aux tirs aux buts. Et lors des trois matchs couperets, ils ont été menés au score et ont su à chaque fois revenir, sans s’affoler. De façon très nette, les Croates sont fatigués (ils ont joué l'équivalent d'un match de plus que les Bleus !), et les leaders techniques comme Modric ou Rakitic n’ont plus beaucoup d’essence dans le moteur. Mais leur mental est tel qu’il faudra pendre garde à eux lors de la finale de dimanche. Même s’il me semble que la France a toutes les armes en main pour faire mal à cette équipe croate.

Le joueur : Ivan Perisic (Croatie)

Décisif sur cette rencontre avec le but égalisateur et la passe décisive pour Mandzukic, Perisic a eu du mal à exister dans une première période où l’ensemble de son équipe a subi, notamment physiquement, la domination anglaise. Mais son superbe but l’a relancé et il a fini très fort, frappant le poteau dans les minutes suivantes, puis mettant le feu sur son côté gauche en prolongation. Un joueur assez irrégulier mais qui peut faire de grosses différences. Dont il ne faut jamais oublier qu’il a débuté sa carrière à Sochaux, où il ne jouait jamais…

La note du match : 6.5/10