Toggle navigation
TimFaitSonCinema
16 / 20  (0)

DANS LA MAISON

Germain Germain est un professeur de français désabusé. Il retrouve goût à son métier grâce à un élève qui lui propose des rédactions assez étranges. Celles-ci racontent ce qui se passe dans la maison de l’un de ses camarades. Peu à peu, ce jeu va devenir de plus en plus malsain…
Verdict:
Avec Dans la maison, François Ozon confirme qu’il est bien un des réalisateurs français les plus intéressants aujourd’hui. Il filme là une sorte de thriller très bien écrit qui s’avère aussi être une vraie réflexion sur la création littéraire. Film singulier mais vraiment réussi avec une confirmation – Fabrice Luchini – et une découverte – Ernst Umhauer.
Coup de coeur:

Le duo Luchini-Umhauer

La date de sortie du film:

10.10.2012

Ce film est réalisé par

François OZON

Ce film est tagué dans:

Thriller psychologique

Chargement...


 La Critique


François Ozon commence vraiment à être un auteur qui compte dans le paysage cinématographique français. Depuis la fin des années 1990, il a créé une filmographie assez singulière, faite d’une douzaine de long-métrages dont j’ai vu quelques uns. Je me souviens avoir été assez interloqué devant Swimming Pool, film assez compliqué à aborder et même à expliquer. Ces deux dernières œuvres m’ont toutes deux en partie plu, bien qu’elles soient extrêmement différentes tant dans le genre que dans le traitement qui est apporté entre un vrai drame intimiste – Le refuge – et une comédie presque vaudevillesque avec un casting d’enfer – Potiche. Là, pour son nouveau film, c’est un peu à une forme d’entre-deux qu’il se plie avec un scénario (de sa main) assez étrange, à la fois simple et beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît au premier abord, mais aussi une brochette d’acteurs non négligeable – Luchini, Scott-Thomas, Emmanuelle Seigner et Denis Ménochet en tête de liste – ainsi qu’une jeune découverte : Ernst Umhauer. A première vue, même s’il me faisait vraiment envie, je m’attendais à un film vraiment intriguant, et même assez bizarre. Ce n’est pas forcément faux car Dans la maison ne ressemble pas à grand-chose d’autre. Mais, assez vite, on se met dans l’ambiance et, finalement, j’ai vraiment eu la sensation d’assister à un très bon film, à la fois intéressant, prenant et même parfois assez brillant.

La première séquence vaut déjà le détour. C’est la réunion de rentrée pour les professeurs d’un lycée et on comprend très rapidement que M. Germain est plus désabusé qu’autre chose. Au dernier rang, un croissant à la main, il semble complètement dépité devant ce que raconte le proviseur sur les nouveautés de l’établissement. De retour chez lui, ce n’est pas beaucoup mieux. Il dit avoir les élèves les plus nuls qu’il n’a jamais eus, sa femme lui rappelant gentiment qu’il entonne le même refrain chaque année. Mais, assez vite, un évènement, et plus particulièrement un écrit, va lui redonner le goût de son métier. C’est celui de Claude qui narre avec beaucoup de détails et de jugements personnels comment il rentré dans la maison de l’un de ses camarades de classe et quel effet cela lui a procuré. Le professeur est alors peu à peu pris dans un jeu assez malsain de voyeurisme et de manipulation. Il se rend bien compte du danger potentiel de tels écrits mais cette « aventure » qu’il va vivre avec les rédactions de cet élève lui redonne aussi goût à la fois dans l’enseignement (enfin, surtout pour cet élève en particulier) mais aussi dans la création littéraire. Un véritable jeu démarre entre ces deux personnages et la façon dont il est écrit et mis en scène est assez brillante. Au fil des rédactions, le jeune homme s’introduit de plus en plus dans la famille de son camarade et le professeur l’aide aussi en commettant des actes qu’il n’aurait jamais faits dans d’autres conditions. La situation est pour le moins malsaine et elle est encouragée par un professeur un peu aveuglé par le pur aspect littéraire de la chose. En effet, il donne des conseils, reprend, fait réécrire certains passages.

Si Dans la maison peut être particulièrement réussi par moments, c’est dans la façon dont la tension monte peu à peu. Une véritable ambiance se dégage des récits qui sont narrés par le jeune homme ou lus par le professeur. On n’a jamais peur mais c’est plutôt une forme de malaise qui s’installe progressivement chez le spectateur qui voit bien que ce qui était au départ une forme de jeu est en train de se transformer doucement en une certaine forme de manipulation. La frontière entre la réalité et le fantasme n’est jamais très nettement établie et le film avance peu à peu dans un entre-deux dont s’accommode très bien la réalisation, à la fois élégante et assez intimiste. François Ozon réussit aussi à ne pas tomber dans le piège de l’exercice de style, pourtant bien tendu avec un tel scénario. La petite histoire de la femme du professeur – sa galerie d’art menace de fermer – ne sert pas à grand-chose mais elle s’inscrit plutôt bien dans tout le processus du long-métrage. En tout cas, elle ne le dérange pas. Elle permet quelques tranches de rigolade car, il faut le dire, Dans la maison est un film extrêmement drôle. Certaines situations, des dialogues et surtout des remarques douces-amères de M. Germain donnent parfois un aspect éminemment amusant à tout le long-métrage. On est loin d’être dans du comique mais, de façon intelligente, par petites touches, le scénario sait vraiment nous faire rire. C’est un peu comme le jeu de Fabrice Lucchini. Il sait parfaitement alterner les moments où il semble rendre un malin plaisir à s’auto parodier et d’autres où il s’inscrit dans une ambiance de plus en plus malsaine. Face à lui, il trouve du répondant avec le jeune Ernst Umhauer, assez étonnant et qui, parfois, fait vraiment peur.

On pourra reprocher à ce film quelques facilités, notamment pour certains passages qui auraient mérité sans doute un peu plus de traitement. De plus, la fin est globalement un peu too much même si la dernière scène, elle, est assez réussie et referme avec élégance et suspense Dans la maison. Mais s’il y a bien un principal défaut que je dois trouver à ce film, il porte sur une séquence en particulier mais je pense être l’un des seuls en France à avoir remarqué quelque chose qui m’a prodigieusement agacé. Pour la faire courte, tout le monde regarde un match de basket soi-disant américain alors que les images montrées et les commentaires nous indiquent clairement qu’il s’agit dans les faits d’un Cholet-Nancy d’il y a deux ans et que l’horaire de visionnage ne peut en aucun cas correspondre à un vrai match NBA qui se déroule bien plus tard dans la nuit en France. Bien sûr, ça ne porte pas à conséquence mais pour un connaisseur du sport comme moi, c’est plus énervant qu’autre chose. Surtout que je ne trouve pas que cela se justifie tant que ça… Mais bon, on est quand même plus dans le domaine du détail qu’autre chose et ça ne peut en aucun cas remettre en question le plaisir que j’ai eu devant ce film. Je le conseille vraiment au plus grand nombre car il me paraît être un très bon compromis entre film d’auteur et film plus grand public, entre humour, drame et thriller,… Bref, Dans la maison est vraiment un long métrage assez unique et plutôt enthousiasmant, et cela à beaucoup de points de vue.



 Rédiger Un Commentaire