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TimFaitSonCinema
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JEUNE ET JOLIE

Isabelle a dix-sept ans, est au lycée, et choisit de se prostituer pour de riches clients. Pourquoi ? Tout au long d’une année, on va suivre son parcours.
Verdict:
Un film fort qui, sur un sujet aussi sensible, s’en tire plutôt pas mal. Personnellement, je n’ai pas vraiment été convaincu par la performance de l’actrice principale, Marine Vacth.
Coup de coeur:

La façon d’aborder le sujet

La date de sortie du film:

21.08.2013

Ce film est réalisé par

François OZON

Ce film est tagué dans:

Drame

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 La Critique


Avec sa régularité métronomique (un film par an), François Ozon continue de creuser son sillon dans le cinéma français. Ce qui caractérise surtout son œuvre, c’est une diversité plutôt importante, entre comédies (voire comédies musicales) et films beaucoup plus intimistes ou au sujet bien moins légers. C’est pourquoi parler du cinéma d’Ozon est toujours un peu compliqué tant il recouvre différentes réalités. Néanmoins, certains aspects reviennent souvent, et ce nouveau film, présenté en Compétition officielle au dernier Festival de Cannes, bien que ne ressemblant pas à ce qu’il a pu faire par le passé, reprend aussi plusieurs thèmes chers au réalisateur. D’ailleurs, à Cannes, le film avait connu une vraie polémique (comme on sait si bien les monter sur la Croisette) mais pas à cause du long-métrage en lui-même mais du fait de propos de François Ozon disant en substance que beaucoup de femmes rêvaient au fond d’elles d’être prostituées. Je ne sais pas bien si la phrase avait été sortie de son contexte et même la manière dont il était arrivé à dire une telle chose, mais le mal était fait et, malgré ses excuses, la machine médiatique était lancée et Jeune et jolie, en tant que film, était passé au second plan. Pourtant, c’est un long métrage dont il y a pas mal de choses à dire, parce qu’il évoque à sa manière un sujet compliqué, qui faisait jusque là plus l’objet de reportages dans des émissions souvent trop racoleuses. Là, François Ozon prend le parti de filmer la jeune fille en question, sans vulgarité et même avec une forme de délicatesse. Pari réussi car Jeune et jolie, malgré un thème plus que casse-gueule, réussit à toujours rester correct mais c’est vraiment un long-métrage sur lequel j’ai du mal à me faire une véritable idée. Et c’est toujours un peu agaçant, il faut bien le dire…

En ressortant de la salle, on est forcément un peu sous le choc par ce qu’on a pu voir car Jeune et jolie est un film fort, qui marque et qui reste assez longtemps en tête. La fin est assez brutale et quelque peu énigmatique comme souvent avec Ozon (épilogue ? fantasme ?). Mais je me suis vite demandé si c’était véritablement le film en lui-même qui touchait ou bien toutes les questions qu’il pouvait soulever : le difficile passage à l’âge adulte, l’ambigüité sur le statut d’Isabelle (doit-on la considérer comme une fille ou une femme ?), le rapport à la famille par rapport à cela, les raisons qui peuvent pousser à en arriver à vendre son corps de la sorte, la découverte de son corps et de son pouvoir sur les autres… Les interrogations sont très nombreuses, et d’autant plus que le film n’apporte finalement que très peu de réponses. Ce n’est visiblement pas le but de François Ozon et c’est plutôt louable car c’est sans doute-là que se situait le piège avec un sujet si sensible et polémique. On peut percevoir à certains moments quelques esquisses d’explication de l’attitude de la jeune femme (j’alternerai donc entre les deux), notamment dans l’absence d’un père, parti vivre en Italie. Mais ce n’est jamais véritablement de ce côté-là que le film va chercher. D’ailleurs, la jeune fille elle-même semble perdue et ne pas bien comprendre ce qui a pu la pousser à faire cela et à continuer. La seule chose qui permet de « comprendre », ce sont en fait quatre chansons de Françoise Hardy qui séparent le film en autant de chapitre (comme cette découpe symbolique en saisons) et dont les paroles peuvent un peu nous éclairer. Mais si ce n’est pas inintéressant dans la construction globale du film, ça ne permet néanmoins pas de réellement aller plus loin dans les explications.

François Ozon confirme en tout cas avec ce film la drôle de fascination qu’il a pour le thème du voyeurisme. Avec lui, certains personnages sont clairement des voyeurs mais, surtout, le spectateur a toujours le sentiment d’observer des choses qu’il n’est justement pas vraiment censé voir. C’était clairement le cas dans Swimming Pool qui jouait justement beaucoup sur ce côté ambigu (plans de loin, à travers des portes ou des fenêtres). Son dernier film, Dans la maison, se basait même complètement sur ce thème et en jouait, avec notamment une dernière séquence très symbolique. Là, dans Jeune et Jolie, ce n’est pas un hasard si le premier plan du film est une vue à travers des jumelles d’Isabelle. On se rend compte en fait que c’est le petit frère de l’héroïne qui observe. C’est sur le principe un peu moins gênant mais, pendant toute la durée du film, on aura l’impression qu’il est lui-même toujours dans une position de voyeur (il écoute beaucoup aux portes notamment et surprend Isabelle dans des moments intimes). Ça va même encore plus loin car, à certains moments, la jeune fille s’observe elle-même, ce qui donne véritablement un aspect très étrange et gênant à ces séquences. Et avec un tel sujet, le spectateur est forcément mal à l’aise devant certaines séquences montrant Isabelle se prostituer avec des hommes beaucoup plus âgés et pas toujours le mieux intentionné du monde. Tout cela donne au film dans son ensemble un aspect, il faut le dire, un peu étrange, voire même, un peu dérangeant. Mais, avec les longs métrages de François Ozon, on sait que l’on n’est pas souvent ménagé et qu’il aime justement bien jouer là-dessus.

Sur Marine Vacth, qui est quand même au cœur du film, j’ai un avis beaucoup moins enthousiaste que tout ce que j’ai pu entendre ci et là depuis des mois. Oui, elle est extrêmement bien filmée par le réalisateur qui arrive parfaitement à la mettre en valeur. Oui, elle est par moments assez troublante, dans ce mélange de détermination, de faiblesse et d’une forme d’incompréhension propre à l’adolescence (car en fait, elle est surtout une adolescente qui se cherche encore). Elle ne sait visiblement pas exactement ce qu’elle veut faire de sa vie et se perd plus qu’autre chose dans la prostitution. Je trouve qu’on voit bien chez elle tous ces dilemmes mais, ensuite, à pas mal de moments, je la trouve assez « fausse » (et même parfois mauvaise), comme si elle n’était plus vraiment dans le monde réel (du fait de sa façon de s’exprimer notamment). C’est sans doute un choix de la part d’Ozon de la filmer de cette manière mais je ne suis pas convaincu par cette façon de faire et je suis persuadé que ça dessert plus l’actrice et le film dans son ensemble qu’autre chose. C’est un peu dommage. Face à elle, on trouve surtout sa mère, interprétée par une Géraldine Pailhas assez intense et qui cherche absolument des explications. Certaines confrontations entre les deux sont assez dures, du fait justement d’une vraie incompréhension. En tant que spectateur, on a aussi ce sentiment devant les actes de cette jeune fille. Mais en l’observant de cette façon, François Ozon livre un film qui fera sans doute parler, réfléchir et débattre mais qui laisse surtout d’une certaine façon plus perplexe qu’autre chose. Il confirme donc qu’il est un auteur pas toujours facile à déchiffrer.


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Fiz 08.09.2013, 20:10

Même réserve que toi, Tim, concernant l'actrice Marine Vacth, pas totalement convaincante dans les scènes plus intimes. Mais c'est peut-être davantage dû à son propre personnage qu'à l'actrice elle-même : ce personnage d'adolescente - qui fait la démarche de se prostituer - semble peu crédible quand elle rencontre ses clients dans les hôtels, tant elle parait intimidée et mal à l'aise. Heureusement, le film reste très prenant : du bon cinéma français, un cinéma où les acteurs et les dialogues sont bien mis en avant. Par ailleurs, la bande originale du film est constituée de chansons de Françoise Hardy qui collent assez bien au portrait de cette adolescente. Un bon film au final.


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