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TimFaitSonCinema
15 / 20  (1)

SILENCE

Au plein cœur du dix-septième siècle, deux prêtres portugais se rendent au Japon dans le but de retrouver le père Ferreira, celui qui leur a tout appris et qui est porté disparu. Dans un pays où les chrétiens sont persécutés, ils vont devoir survivre mais également faire perdurer leur foi, malgré les épreuves qui leur sont infligées…
Verdict:

Malgré quelques petites longueurs évitables en son cœur, Silence reste un film très impressionnant, notamment du fait de la qualité de l’image et de quelques séquences vraiment splendides. Cette réflexion sur la foi est même par moments franchement captivante. Andrew Garfield y démontre une nouvelle fois tout son talent et Adam Driver, lui, est plutôt convaincant. 

Coup de coeur:

La qualité de l’image

La date de sortie du film:

08.02.2017

Ce film est réalisé par

Martin SCORSESE

Ce film est tagué dans:

Drame historique

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 La Critique


A presque soixante-quinze ans et après pas loin de vingt-cinq long métrages à son actif, Martin Scorsese est encore capable de surprendre… En effet, ces derniers temps, aucun de ses longs métrages ne ressemble vraiment au précédent. Jonglant de la grande fresque historique (Gangs of New York) au biopic fiévreux (Le Loup de Wall Street), tout en passant par le film policier (Les Infiltrés), le thriller psychologique (Shutter Island) ou encore le film d’aventure pour plus jeune public (Hugo Cabret), celui qui est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands réalisateurs américains encore en activité n’est jamais vraiment là où on l’attend et sa carrière prend parfois des détours relativement inattendus. Son nouveau film est d’ailleurs le fruit d’un projet qui commence à dater puisque cela fait plus de vingt ans que Scorsese a dans l’idée d’adapter le roman de Sh?saku End?, qui avait déjà été porté à l’écran en 1971 par Masahiro Shinoda. D’ailleurs, on peut voir dans ce film clairement centré sur la question de la spiritualité une continuité assez évidente avec une œuvre comme La Dernière Tentation du Christ par exemple. De réécritures du scénario en reports de mise en production, le long métrage ne s’est finalement jamais fait et toute la distribution qui était prévue pour un tournage en 2009 – et qui avait une sacrée gueule (Daniel Day-Lewis, Benicio del Toro, Gael Garcia Bernal et Ken Watanabe) – a finalement été remplacée avant que les prises de vue ne débutent enfin véritablement au début de l’année 2015. Ce sont donc les plus jeunes Andrew Garfield et Adam Driver qui ont repris les rôles principaux en plus de Liam Neeson, avec qui le réalisateur avait déjà travaillé auparavant. Si Silence est un long métrage qui vient de loin et semble être un projet qui tient vraiment à cœur de Scorsese, est-il pour autant une réussite du point de vue cinématographique ?

 

Ce que l’on peut dire pour débuter, c’est que Silence est loin d’être un film qui est facile d’accès. On peut même parler d’un cinéma relativement aride, qui prend son temps et qui, en ce sens, est très loin des canons actuels d’œuvres de plus en plus trépidantes. Ça en fait d’ailleurs un projet extrêmement libre et, en ce sens, presque encore plus passionnant. D’ailleurs, c’est assez amusant de voir la manière dont on est à l’extrême opposé du Loup de Wall Street qui m’avait justement déplu par son côté outrancier dans le rythme et la mise en scène. Là, Scorsese cherche de façon assez claire à offrir au spectateur une œuvre très calme, presque contemplative par moments et dont la force est justement à trouver dans ce rythme lent et ces longs plans extrêmement maitrisés desquels immanent une beauté par moments sublime. Grâce au travail assez extraordinaire de Rodrigo Prieto, directeur de la photographie que j’identifie personnellement aux films d’Iñárritu, Silence est rempli de plans stupéfiants dans leur construction et dans leur éclairage. Le jeu avec la brume ou avec la nature est vraiment exceptionnel, notamment dans la première partie du long métrage. Cela plonge les personnages dans une atmosphère qui est à la fois angoissante (on ne voit pas toujours très bien ce qui se passe) mais également onirique, puisque le Japon rural de cette période apparaît alors comme une sorte de monde parallèle, où la nature a encore tous ses droits et, d’une certaine façon, dicte sa loi. Cette beauté formelle donne à Silence un aspect véritablement captivant, au sens premier du terme tant on a du mal, en tant que spectateur, à se détacher de cette qualité d’image. Au point que c’en est presque dérangeant par moments car même les séquences de torture, particulièrement terribles sur le fond, sont magnifiées sur la forme par le travail de mise en scène.

 

Mais Silence ne peut se résumer qu’à un bel exercice de réalisation et cette mise en scène très posée sert également un propos sur la foi qui est loin d’être inintéressant. En effet, ce n’est pas un film sur la religion à proprement parler, même s’il s’agit de chrétiens qui cherchent à évangéliser une terre qui leur est hostile. Ici, ce qui est important, c’est bien la dimension personnelle de la foi et non son côté « politique » qui est véritablement au cœur du récit et notamment la question suivante : jusqu’où est-on prêt à aller dans la souffrance pour (é)prouver sa foi ? La thématique de la trahison (qui est directement liée) est également centrale avec ce parallèle assez évident fait avec l’histoire de Jésus et Judas. Et le film prend véritablement de la hauteur dans toute la deuxième moitié, lorsque le père Rodrigues (Andrew Garfield, toujours plus magnétique) se retrouve enfermé et que les bourreaux décident de parler avec lui. Les réflexions qui ressortent de dialogues très bien écrits sont très intéressantes et prennent une dimension particulière aujourd’hui, dans un monde où le fait religieux semble reprendre de la vigueur et où tout ou presque est justifié dans ce cadre. Jusqu’au dernier plan, ces questions restent posées et trouvent du sens. Scorsese parvient à éviter en grande partie le manichéisme en ne cherchant aucunement à être prosélyte. Si les Japonais passent pour des bourreaux, ce sont également eux qui poussent la réflexion sur la foi le plus loin possible et, d’une certaine manière, ces prêtres catholiques apparaissent également sous un jour peu flatteur, prêts à tout pour imposer une vision qui n’est pas forcément la bienvenue. Je suis bien d’accord pour dire qu’il y a quelques longueurs, notamment au cœur du film où le scénario piétine un peu, mais, d’une certaine manière, je me dis qu’il y a là une certaine logique car cela participe du cheminement intérieur du personnage principal qui cherche des réponses à des questions qui se font de plus en plus complexes pour lui. Dans le silence (la musique est absente), le spectateur est invité à réfléchir à ces différentes thématiques et c’est selon moi l’une des grandes réussites d’un long métrage qui marque.  



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Fiz 23.02.2017, 20:52

Oui, c'est un film qui plonge dans une profonde perplexité... et qui travaille encore longtemps après sa projection. Quel est le message du film? Difficile à dire tant ce film sur la persécution des chrétiens soulève de questions autour de la foi, l'évangélisation, l'apostasie, le sens des martyrs, le Silence de Dieu face à la souffrance des chrétiens persécutés ("Mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?"),... c'est d'ailleurs ce contenu si riche qui rend le film intéressant malgré sa longueur (2h40) et ses défauts assez nombreux. En effet, ce riche contenu ainsi que la mise en scène spectaculaire offrant de belles images à l'écran (de paysages maritimes ou de processions dans la brume) ne parviennent toutefois pas à masquer complètement les faiblesses du film: plutôt mal joué dans l'ensemble (interprétation peu convaincante), le film est également un peu maladroit dans sa façon de montrer les choses tant tout y est très appuyé, surligné, bref c'est un film très démonstratif. Par ailleurs, Martin Scorsese a une certaine complaisance à montrer la souffrance dans les nombreuses séquences de tortures (très variées), ce qui confère à son film un coté malsain (voyeurisme).


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