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TimFaitSonCinema
La guerre éclate en Europe et Desmond Doss, un jeune américain décide de servir son pays. Mais ses principes religieux et moraux lui interdisent de tuer et même de tenir une arme. Après une longue bataille avec la hiérarchie militaire, il obtient le droit de partir à la guerre sans fusil. Il deviendra même un héros…
Verdict:

Tu ne tueras point est un bien drôle de film où à une première heure hyper classique et presque un peu mièvre, répond une deuxième absolument dantesque visuellement. Jamais sans doute un réalisateur n’était allé aussi loin dans la représentation de la violence des combats de la Deuxième Guerre Mondiale. Le bilan est donc forcément contrasté mais, quand même, quelle claque on prend…

Coup de coeur:

Les scènes de combat

La date de sortie du film:

09.11.2016

Ce film est réalisé par

Mel GIBSON

Ce film est tagué dans:

Film de guerre

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 La Critique


Ca y est, la traversée du désert semble terminée pour Mel Gibson. Et que celle-ci fut longue… En effet, depuis une bonne dizaine d’années, celui qui était l’un des chouchous d’Hollywood a connu une sorte de descente aux enfers. Cela est dû à la fois à des choix artistiques très forts et incompris, à des prises de position extrémistes dans un bon nombre de domaines (contre les juifs, les homosexuels ou les noirs, pêle-mêle) et à la révélation de son addiction pour l’alcool qui lui a valu certaines condamnations judiciaires mais, surtout, aux yeux de l’opinion publique et des studios. Pourtant, on peut dire que l’Australien était jusque-là l’une des très grandes stars du cinéma mondial, autant en tant qu’acteur (les Mad Max, les Arme fatale notamment), qu’en tant que réalisateur puisque, dès son deuxième long métrage, il faisait le doublé Meilleur film – Meilleur réalisateur aux Oscars avec Braveheart (rien que ça !). Jusque-là, il faisait l’unanimité. Mais les choses ont changé avec ses deux réalisations suivantes, au milieu des années 2000. D’abord avec La Passion du Christ, à la fois pour sa lecture hyper-violente des dernières heures de Jésus mais aussi pour un message supposé antisémite (je n’ai pas vu donc j’ai du mal à donner mon avis), puis avec Apocalypto, autre film très brutal sur l’histoire de l’empire Maya avant que les Espagnols ne le conquière (pas visionné non plus). Pendant dix ans, on ne le verra presque plus, sauf devant la caméra de Jodie Foster, pour Le complexe du Castor ou encore dans des seconds rôles de films d’action pas forcément très réussis. Tu ne tueras point marque donc véritablement son come-back et on peut noter qu’il n’est pas non plus signe d’un retour en grande pompe à Hollywood puisque le long métrage est en grande partie australien, à la fois dans sa production mais également dans son tournage, qui s’est intégralement déroulé là-bas ainsi que dans son casting, majoritairement wallaby (pour parler en termes rugbystiques). Ce retour sur le devant de la scène est-il pour autant signe d’un grand film ?

 

Tu ne tueras point est un long métrage sur lequel j’ai du mal à me faire réellement un avis, notamment parce que certains aspects m’ont beaucoup plu et d’autres beaucoup moins. On pourrait presque diviser le film en deux, ou encore, par moments, complètement dissocier le fond et la forme, pour expliquer ce qui fonctionne ou pas ici. Ainsi, faire une synthèse d’un long métrage aussi peu cohérent a quelque chose de vraiment compliqué. Mais je vais m’y atteler du mieux possible. Et s’il y a bien quelque chose qui traverse l’ensemble du film, c’est bien la référence à la religion, faisant du personnage principal une figure christique manifeste (voir le dernier plan, ultime symbole). Evidemment, on sait que Mel Gibson est un fervent catholique (tendance très conservatrice) et il n’est donc pas étonnant de voir tout cet aspect fortement mis en valeur. Mais, en même temps, il faut tout de même préciser que le titre français est directement tiré de la Bible et donne donc une dimension particulière au film, là où le titre original (Hacksaw Ridge) est plus factuel (c’est le lieu de la bataille, tout simplement) et s’inscrit donc davantage dans la longue lignée des films de guerre américain. Et la religiosité reste un élément essentiel du scénario puisque Desmond Doss était adventiste du septième jour et c’est sa conscience religieuse, ainsi qu’une enfance compliquée, qui expliquent son attitude lors de la guerre et son refus de se soumettre à sa hiérarchie, concernant le port d’une arme. Tu ne tueras point est donc basé sur une histoire vraie et celle-ci fait partie de ces destins que même le plus barré des scénaristes n’aurait pas forcément osé développer. En effet, le personnage part à la guerre sans fusil, dans l’idée unique de sauver des soldats et de ne pas en tuer. Mais il devra mener un premier combat, le droit justement de ne pas avoir d’arme. Et c’est l’objet de toute la première partie du film.

 

Car ce long métrage est très clairement divisé en deux parties, extrêmement différentes : la première où on voit la jeunesse du personnage principal et son combat pour rester fidèle à ses valeurs, et la seconde où nous est montré ce qu’il accomplit sur le champ de bataille. Honnêtement, la première heure m’a quelque peu inquiété. En effet, on est dans quelque chose qui a déjà été vu et revu, avec un romantisme un peu éthéré, fait d’une musique dégoulinante, de ralentis inutiles et de dialogues franchement idiots par moments. Au bout d’un moment, on s’y fait parce que c’est joli visuellement et ça en devient presque charmant tant ce classicisme, qui franchit parfois les limites du convenable, semble assumé. Et, au final, je me demande si ce côté presque mièvre n’est pas renforcé afin que le spectateur se sente dans un certain confort et soit encore davantage « dérouté » par ce qui l’attend par la suite. Car le deuxième mouvement du film, du moment que l’on se retrouve au pied de cette falaise que l’armée américaine doit absolument reprendre aux Japonais, n’a plus rien à voir avec ce qu’on a pu voir avant et se construit presque comme son exact opposé : cruel, violent et sans aucune concession. Pendant près d’une heure, le spectateur se retrouve en effet réellement au cœur d’un combat sans merci dont il est impossible de s’échapper. Avec sa caméra hyper mobile, son montage frénétique, ses prises de vue impressionnantes, un souci du détail de tous les plans, une musique hyper adaptée, Mel Gibson redéfinit complètement la manière de filmer les combats et c’est franchement impressionnant. Il arrive même à instaurer des séquences de suspense palpitantes au cœur des combats. C’est parfois un peu outrancier, avec des ralentis pas forcément utiles, ou des plans vraiment gores, mais c’est aussi la réalité d’une guerre sans merci.

 

Au milieu de tout ce carnage, Desmond Doss va véritablement s’accomplir et prouver qu’il a véritablement un rôle dans cette guerre, même s’il a décidé de ne pas tirer un seul coup de feu. Alors que le personnage paraissait un peu niais au départ (la voix française ne l’aide sans doute pas beaucoup), il va complètement se révéler. Et Andrew Garfield permet bien de montrer cette évolution, d’une fragilité presque maladive à une force qui fait de lui un véritable héros, redéfinissant d’une certaine manière ce que peut être un soldat dans de telles circonstances. On peut évidemment regretter que le scénario ne fasse des Japonais rien de plus que des bêtes élevées pour tuer, au mépris même des règles élémentaires de la guerre. Ils ressemblent presque à des zombies, tout droit sortis d’un film d’horreur. Le scénario choisit clairement son camp et cela fait manquer de mesure à l’ensemble mais c’est aussi un choix qui peut se comprendre ici. Peut-être Mel Gibson voudra-t-il raconter la même histoire de l’autre point de vue, comme Clint Eastwood a pu le faire avec Mémoires de nos pères puis Lettres d’Iwo Jima ? Franchement, je n’en suis pas persuadé… Le discours général, assez ambigu, entre la répulsion et une certaine fascination pour la violence engendrée par la guerre, est lui aussi discutable, notamment dans la façon dont il a de traiter principalement d’un pacifiste, tout en montrant que son sacrifice n’en est que plus grand du fait de l’enfer dans lequel il se trouve. En ce sens, on pourrait presque dire de Tu ne tueras point que c’est un long métrage naïf. Mais Mel Gibson semble complètement assumer cet aspect, de sorte que le film parvient à se tenir correctement jusqu’au bout. Réflexion sur la foi, aussi bien en Dieu qu’en son prochain, le film est parfois un peu trop dans l’emphase de ce côté-là mais je crois qu’il faut dépasser cet aspect et se souvenir de la puissance visuelle déployée pendant plus d’une heure…



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Seb 17.11.2016, 19:37

Et il faut souligner un fait : sur les faits de ce fameux Desmond Doss, le film va moins loin que la réalité pour éviter d'intégrer trop d'héroïsme qui rendrait le film peu crédible, c'est suffisamment rare pour être mentionné !

Sinon moi j'ai trouvé que le film avait un autre mérite, c'est de parler de religion (on connait tous les convictions de ce bon vieux Mel), sans faire du prosélytisme et en le montrant de façon assez neutre. Ça aussi, j'ai trouvé que c'était à mettre au crédit du film.
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Fiz 22.11.2016, 15:36

100 % d'accord avec vos analyses. Les scènes de guerre de la seconde partie du film sont en effet époustouflantes, quelle mise en scène impressionnante! On sort du film complètement secoué et groggy... Et effectivement, les convictions religieuses du personnage principal s'affirment sans aucun prosélytisme de sa part (ni de la part de Mel Gibson dans sa façon de montrer les choses), avec simplement cette question intéressante de vouloir concilier sa foi et ses actes.
Juste dommage que la première partie soit un peu niaise et maladroite dans l'interprétation... faut dire que c'est souvent le gros point faible de beaucoup de films américains ou assimilés. Mais pour ce film, la puissance visuelle de la seconde partie emporte tout sur son passage!


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