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TimFaitSonCinema
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PROMISED LAND

Steve Butler est représentant pour une société qui exploite du gaz de schiste. Son travail consiste en convaincre les habitants des endroits où il passe de pouvoir forer leurs terres moyennant finance. Mais, dans une bourgade de Pennsylvanie, les choses ne vont pas se passer comme prévues…
Verdict:
Film militant, ce qui ne l’empêche pas d’être drôle, bien au contraire, Promised Land déçoit par une structure narrative un peu trop convenue et une fin plus discutable. Ce long-métrage ne restera sans doute pas dans les mémoires.
Coup de coeur:

Frances McDormand

La date de sortie du film:

17.04.2013

Ce film est réalisé par

Gus VAN SANT

Ce film est tagué dans:

Drame

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 La Critique


Ce film aurait dû être le premier réalisé par Matt Damon lui-même. En effet, au tout début du projet, c’est comme cela que les choses étaient prévues. Après s’être fait connaître par l’intermédiaire d’un scénario co-écrit avec son ami Ben Affleck en 1997 (Oscar gagné pour Good Will Hunting), Matt Damon s’était surtout fait connaître en tant qu’acteur même s’il avait aussi écrit (cette fois-ci avec Gus van Sant et Casey Affleck, petit frère de) le scénario de Gerry. Cette fois-ci, il a écrit le scénario avec un autre acteur (c’est décidément une habitude), John Krasinsky, il est aussi acteur co-producteur et avait donc décidé de passer derrière la caméra. Pour des questions d’emploi du temps, il n’a pas pu réaliser ce souhait (en confiant que ce n’était que partie remise) et a donc mis « son » film dans les mains d’un réalisateur en qui il avait une entière confiance et qui avait mis en scène ses deux précédents scénarios : Gus van Sant. Ce dernier, après un petit passage du côté du long métrage plus intimiste avec Restless, retrouve un film militant comme avait pu clairement l’être son avant-dernier, Harvey Milk, sur la cause du droit des homosexuels aux Etats-Unis. Là, c’est un sujet tout aussi sensible, et traité de manière plus contemporaine (Harvey Milk s’inscrivait dans une logique plus historique) : les gaz de schiste qui font tant polémique actuellement des deux côtés de l’Atlantique. Autant le dire tout de suite, je ne suis ni partisan ni opposant à ce procédé d’extraction même si une information que j’ai pu avoir dessus (dans le cadre professionnel) ne m’a pas forcément emballé sur le principe. Après tout, là n’est pas vraiment la question et il s’agit plutôt de juger le film en tant que tel. Et c’est dans l’ensemble plutôt pas mal sans être non plus incroyable, loin de là.

Néanmoins, un élément qui ne rentre pas directement dans la conception du film mais qui l’influence tout de même doit être évoqué car il permet de comprendre pas mal de choses que je développerai plus loin dans la critique. Il s’agit de la participation visiblement importante d’Abu Dhabi au financement du film à travers la société Film Nation. Ce n’est pas la première fois que cette dernière participe à un long métrage puisque, dernièrement, Contagion ou La couleur des sentiments avaient aussi bénéficié de financements. Mais dans le cadre d’un film sur les gaz de schiste, cela prend un relief tout à fait différent. En effet, cet émirat possède près de 5% des réserves de gaz naturel alors que sa surface ne représente que 0,01% de la surface du globe (calcul à la louche). Il en tire une grande partie de sa richesse. On peut comprendre qu’il tienne à conserver un poids important, alors que celui-ci pourrait être menacé par l’extraction de gaz de schiste. L’investissement dans Promised Land ne peut donc être neutre et influe forcément sur le film, même si, visiblement, Matt Damon et John Krasinsky ont plutôt l’air déjà convaincu du danger de cette méthode. Après cette petite digression de géopolitique cinématographique qui a son importance, parlons vraiment du long-métrage en lui-même, parce qu’il y a des choses à dire…

Le scénario construit par les deux acteurs se base donc sur l’histoire d’un homme qui, justement, veut « imposer » aux habitants un forage sur leurs terres. Pour cela, il a un discours bien rodé, basé principalement sur le fait que sans cela, c’est la ville entière qui, peu à peu, s’éteindra d’elle-même. En insistant de cette manière sur la thèse contraire de ce que l’on veut montrer, c’est une façon détournée, mais presque plus efficace, de, justement, accréditer ce que l’on cherche à « prouver ». Très vite, en effet, nous est montré le côté assez cynique et sans scrupule de cette compagnie, incarnée ici par un employé visiblement modèle. Même quand les premières voix hostiles se font jour et qu’une association écologiste débarque dans le coin, il reste droit et continue à tout faire pour que les habitants acceptent. Il est accompagné par une autre collègue qui, elle, pour le coup, est un peu plus funky, non sans s’acquitter le plus efficacement possible de sa tâche. Comme beaucoup de films ces derniers temps, Promised Land parle d’une Amérique déshéritée et touchée par la crise (je pense ici par exemple à The place beyond the pines). Dans ce long-métrage, ça va même plus loin puisque, là, ce sont les Etats-Unis rurales contemporaines, finalement peu traitées, qui sont le véritable sujet du film. En effet, pour ces habitants, la question du gaz de schiste est cruciale car elle concerne directement leurs enfants et les perspectives d’avenir. Le film interroge bien toutes ces problématiques et montre les différentes réactions qu’il est possible d’avoir face à des sommes qui peuvent parfois faire perdre la tête. Tout est tellement bien montré que c’en est presque parfois un peu scolaire.

Parce que Promised Land a quelque chose d’assez convenu et classique dans la façon qu’il a de dérouler son histoire un peu manichéenne, il faut bien le dire. D’ailleurs, la réalisation l’est tout autant puisqu’il n’y a pas de fioritures mais rien de bien folichon non plus… C’est un vrai film militant, qui ne prend pas vraiment de pincettes et dont la fin renforce encore cet aspect. Je n’en dis pas beaucoup plus mais je la trouve ratée car beaucoup trop caricaturale et pas assez expliquée. En plus, il y a une petite histoire d’amour bien sentie là au-milieu, qui donne un air un tout petit peu « cucul » à l’ensemble. Selon moi, le scénario dans son ensemble n’est pas assez travaillé et fait perdre au film de son pouvoir de persuasion. A trop en faire, souvent, on s’y perd… Mais, paradoxalement (ou pas), les dialogues sont, eux, très bien écrits et font donc souvent mouche. Il y a ainsi quelques très bonnes répliques, notamment avec ce duo qui, visiblement, travaille ensemble depuis un certain temps et passe son temps à se taquiner. Face à un Matt Damon plutôt convaincant, on trouve une Frances McDormand qui se faisait assez rare ces derniers temps et qui est vraiment géniale ici (de toute façon, rien que de voir sa tête me fait rire…). Il y a des situations vraiment amusantes et on rigole plutôt souvent, plus en tout cas que ce à quoi on s’attend au départ. C’est tout le paradoxe d’un film militant qui cherche vraiment à montrer quelque chose et qui, finalement, s’apprécie plus pour son humour un peu décalé que par le message qu’il veut faire passer de manière parfois un peu trop pompeuse.



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