La Critique
En allant voir ce film, je ne m’attendais pas au chef d’œuvre de l’année. J’en avais bien conscience mais j’avais le secret espoir d’une dernière bonne surprise pour cette année, ce qui n’était pas tout à fait exclu, ou, au moins l’intention de pouvoir passer un bon moment devant une honnête comédie. Ce qui m’a « poussé » à aller voir ce film, c’est aussi la présence de Laurent Lafitte, que j’aime plutôt bien (contrairement à beaucoup de monde, visiblement). Il a une tête qui me fait rire et un côté un peu de la « haute » qui correspond bien à pas mal de personnages qu’il incarne, et particulièrement à celui-ci d’ailleurs. De plus en plus présent dans la comédie française, c’est la première fois qu’il a un vrai rôle en solo dans un long métrage appelé à avoir un succès (même si, après l’avoir vu, je doute d’une telle affirmation). 16 ans... ou presque est la première réalisation de Tristan Séguéla (fils de…) et est produit par UGC, qui a quand même pas mal fait de pub autour du long métrage. Malheureusement, malgré une idée de départ qui n’est pas si idiote et qui aurait pu lancer le film sur des bons rails, ça ne fonctionne absolument jamais et, surtout, ça s’enfonce peu à peu dans le grand n’importe quoi et finit par être un long métrage qui ne ressemble vraiment pas à grand-chose de convenable… Tellement qu’il n’y a finalement pas beaucoup à en dire tant c’est pauvre à tous les niveaux. Je vais essayer quand même un peu, parce que j’ai bonne conscience, mais je vais être obligé de me gratter la tête pour trouver deux-trois idées à développer au milieu de ce vide. 16 ans... ou presque est le prototype du film tellement creux qu’on se demande même comment des gens peuvent mettre de l’argent dans un tel projet.
Alors, oui, c’est vrai que le pitch de début n’est pas complètement absurde et, d’une certaine manière, ressemble un peu (en encore plus marqué) à celui du film Les gamins. Mais là où le long métrage d’Anthony Marciano réussissait à enchainer les situations très drôles dans un scénario qui se tenait sans être exceptionnel, celui de Séguéla sombre très vite dans le n’importe quoi. On assiste à une suite de séquences de plus en plus absurdes. Bien sûr, elles montrent la manière dont cet homme caricaturalement « intellectuel » devient un ado tout ce qu’il y a de plus immature et débile. Mais les situations sont tellement marquées que l’on ne peut pas y croire une seule seconde. Le registre choisi est celui de la comédie très lourde où on surligne tout en en rajoutant des tonnes. En gros, c’est régressif à souhait. Mais n’est pas Judd Apatow qui veut et, le souci, c’est que là, ça tourne totalement à vide et que ça ne fonctionne jamais. Il n’y a presque aucune scène vraiment amusante et si on se fait arracher deux sourires en une heure et demie, c’est bien le bout du monde. C’est surtout extrêmement vulgaire (aussi bien dans les dialogues que dans les scènes elles-mêmes) et ça en devient presque gênant, notamment par rapport à l’image d’une certaine jeunesse qui est donnée. D’ailleurs, en ce sens, 16 ans... ou presque est un long métrage qui s’adresse presque exclusivement à la génération ado qui s’y retrouvera peut-être (même si c’est tellement caricatural que j’en doute un peu). Si on a même cinq ans de plus, on se sent un peu exclu de toutes ces blagues, réflexions et façons de faire qui semblent apparaître ici. Et on ne s’identifiera pas non plus à ce Arnaud, dont le portrait est brossé sans aucune mesure.
Laurent Lafitte prend visiblement pourtant un certain plaisir à l’interpréter et il arrive à bien le jouer sur les deux tableaux (l(intellectuel coincé et l’ado déglingué). Mais il n’arrive pas à faire surnager un film qui s’enfonce peu à peu dans une forme d’abîme dont le réalisateur aura sans doute du mal à se relever (comment peut-on raisonnablement lui confier de nouveau un long métrage ?). Même tous les personnages secondaires ne sont pas réussis et n’apportent absolument rien. Pourtant, voir Jonathan Cohen, capable à lui tout seul de vampiriser une scène dans Un plan parfait, en vendeur de kebab aurait pu donner un second rôle amusant mais il n’en n’est rien… Les parents aussi sont totalement inutiles et le passage sur la relation avec le père est assez étonnant quand on sait de qui le réalisateur est le fils. On se demande quel message le metteur en scène veut faire passer (s’il veut vraiment en faire passer un car, parfois avec ce film, on se demande bien quel intérêt il a bien pu y voir). Je suis sans doute un peu méchant mais c’est quand même terrible de voir une comédie comme celle-ci, qui accumule les clichés et ne fait jamais dans la demi-mesure, surtout à partir d’un point de départ qui, mieux exploité, aurait pu donner quelque chose de moins mauvais. Ce qui prouve encore une fois que, même avec un pitch honnête, on peut faire à peu près n’importe quoi. Au moins, le seul avantage de cette séance, c’est qu’elle m’aura permis de répondre à une question existentielle que je me posais depuis très longtemps : oui, ils lancent les séances s’il n’y a personne dans la salle. En effet, j’étais seul et je suis arrivé à la toute fin des bandes-annonces. Le long métrage était donc projeté. Après avoir vu le film, je me suis dit que c’était finalement assez logique et presque rassurant que je sois seul dans cette grande salle. Le film ne mérite pas même pas qu’on perde une heure et demie de sa journée. C’est aussi le revers de la Carte Illimitée : aller visionner des longs métrages dont on pense bien qu’ils seront loin d’être géniaux. C’est le jeu…