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TimFaitSonCinema
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ILO ILO

Jiale est un enfant turbulent dont les parents ont du mal à s’occuper. Ils font donc appel à Terry, une jeune Philippine, qui va aussi remplir les tâches domestiques. La cohabitation ne sera pas évidente…
Verdict:
Maitrisé, formellement réussi, et liant plusieurs thématiques intéressantes, Ilo Ilo manque quand même un peu de coffre pour être un vrai grand film. Mais c’est très prometteur pour son jeune réalisateur.
Coup de coeur:

La manière de lier chronique sociale et familiale

La date de sortie du film:

04.09.2013

Ce film est réalisé par

Anthony CHEN

Ce film est tagué dans:

Drame familial

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 La Critique


Au dernier Festival de Cannes (oui, je sais, beaucoup de films qui sortent actuellement sont passés par Cannes), lo Ilo avait remporté la prestigieuse Caméra d’Or qui récompense le meilleur premier film dans toutes les sélections. Et si tous les vainqueurs n’ont pas forcément fait une immense carrière derrière, deux vrais talents se sont révélés dans les cinq dernières années avec Steve McQueen pour Hunger et Benh Zeitlin pour Les Bêtes du sud sauvage (dont on attend quand même confirmation avant den tirer une conclusion définitive). Cela montre bien que ce prix a un sens et peut vraiment déboucher sur une grande carrière. Anthony Chen est très jeune (il n’a pas encore trente ans) et, grâce à cette récompense, il s’ouvre forcément beaucoup de portes, peut-être vers Hollywood, même s’il faudra pour cela que son film soit reconnu à l’international (par exemple à travers une nomination au film étranger de l’année pour les prochains Oscars). Il faut dire que son premier long métrage n’est pas mal du tout et démontre surtout une vraie maitrise pour un si jeune réalisateur. Alors que, parfois, les artistes encore débutants ont plutôt le défaut de trop en faire pour montrer tout ce qu’ils savent faire, Anthony Chen reste plutôt bien mesuré et choisit la maitrise formelle pour son premier film. Heureusement, car, au niveau du scénario, c’est beaucoup plus foisonnant. En effet, Ilo Ilo, sous ses dehors de chronique familiale assez simple, aborde en fait de très nombreux sujets, notamment sur la situation sociale à Singapour. Ainsi, c’est un film qui est très loin d’être inintéressant et qui mérite un visionnage mais qui, dans l’ensemble, n’est pas non plus exaltant. Du bon cinéma, en somme.

Tout se passe au sein d’une famille Singapourienne que l’on peut qualifier de classe moyenne. La mère travaille beaucoup, le père, lui, est au chômage (ce que sa femme ignore) et leur enfant est plus que turbulent. L’arrivée dans ce cocon d’une quatrième personne, en l’occurrence une bonne, va quelque peu chambouler l’ensemble. D’abord parce qu’elle n’est pas du même niveau social (ni de la même nationalité) et est un peu exploitée par sa patronne. Ensuite parce qu’elle va tout faire pour nouer une relation particulière avec Jiale, ce qui, au premier abord, est loin d’être gagné. Le réalisateur filme cela avec beaucoup de délicatesse, en laissant une vraie place aux images et à la succession d’évènements qui, reliés entre eux, permettent de saisir l’atmosphère familiale. C’est presque une chronique d’une famille ordinaire, avec des passages plus ou moins durs, et, parfois, il faut bien le dire, c’est une peu longuet et répétitif sur les bords. Mais là où le film devient vraiment intéressant, c’est dans la manière qu’il a de lier intimement cela à une vision plus globale de la société de Singapour alors en pleine crise économique. Les deux parents vivent la dureté des licenciements (pas du même côté) et on voit bien comment le monde dans lequel ils évoluent est en train de tourner et comment, peu à peu, ils semblent glisser vers un inexorable déclassement dans la société. Ainsi, on peut parler d’Ilo Ilo comme d’un film « social », voire « sociétal » par rapport à cette manière qu’il a de chercher à montrer, parfois très ponctuellement, les travers du monde dans lequel les personnages évoluent mais aussi la manière dont cela influe sur leurs comportements.

On sent véritablement que ce réalisateur a quelque chose. Il sait en quelques plans faire comprendre des éléments pas évidents et a un vrai regard critique sur la société. Avec une économie de moyens de mise en scène (formellement, c’est clair et net), il réussit à dire énormément. C’est un vrai atout mais je trouve que, dans ce film, il ne va pas assez loin dans ses intentions et peine finalement un peu à réellement exposer son talent que l’on devine pourtant. Il a clairement beaucoup d’idées mais le tout n’est pas toujours assez bien ordonné ce qui donne, à certains moments, un aspect un tout petit peu fouillis. Mais, bon, dans l’ensemble, ce que l’on peut dire, c’est que Chen sait filmer mais aussi écrire (il est scénariste ici). Il a un côté assez clinique et distancié qui permet à son film de ne pas trop s’étendre et d’en rester au maximum à l’essentiel. Dans sa façon de scénariser son histoire, il ne s’interdit pas une certaine forme d’humour, toujours un peu grinçant, qui permet parfois d’avoir un regard un peu décalé. C’est notamment le cas pour la relation du couple, qui vivent plus en cohabitation que véritablement ensemble. Tout cela donne finalement un long métrage qui ne restera sans doute pas dans les annales mais qui pose d’emblée son auteur et lui donne plutôt une jolie carte de visite. A lui de faire fructifier le talent qu’il a et de prendre un peu plus d’ampleur afin de réaliser des vrais grands films. Je l’en sens capable et c’est pourquoi je le suivrai avec attention dans le futur.



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