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TimFaitSonCinema
En 2010, le site WIkileaks met un gros coup de pied dans la fourmilière en révélant un nombre impressionnant de documents confidentiels. Le film raconte l’histoire de celui qui se cache derrière ce site, Julian Assange, ainsi que de son bras droit à l’époque, un jeune allemand un peu idéaliste.
Verdict:
Il est juste dommage que la très bonne interprétation des deux acteurs principaux soit gâchée par un film dans l’ensemble pas bon : ça part dans tous les sens mais ne s’attaque pas aux vrais enjeux. Peut-être aussi qu’il n’y a pas assez de recul pour porter cette affaire au cinéma…
Coup de coeur:

Les deux acteurs principaux

La date de sortie du film:

04.12.2013

Ce film est réalisé par

Bill CONDON

Ce film est tagué dans:

Thriller

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 La Critique


L’affaire Wikileaks a été un énorme bouleversement pour le monde entier. En effet, quand tous ces documents classés secret-défense ont été mis sur la place publique, la façon de penser l’information et le comportement des gouvernements a forcément été radicalement changé. Personnellement, je ne sais pas trop quoi penser de tout cela et, au fond, ce n’est pas vraiment le plus important. Par contre, ce qui est assez fascinant, c’est que toutes ces révélations ont eu lieu en 2010 et que, fin 2013, il y ait déjà un long métrage qui soit sur les écrans. Bien sûr, les producteurs essaient de plus en plus de coller à l’actualité mais j’estime que sur des affaires aussi sensibles et polémiques, il serait tout de même bien de se donner un temps de recul nécessaire afin d’être en capacité d’analyser au mieux ce qui s’est passé. Parce que là, c’est vraiment trop proche pour qu’on ne s’intéresse qu’au film et non à tous les à côtés. En effet, Julian Assange, qui est forcément au cœur du film, fait encore parler de lui alors qu’il est réfugié à l’Ambassade de l’Equateur à Londres et il n’a pas cessé de détruire ce long métrage, mettant même en ligne sur internet le jour de la sortie américaine un documentaire produit par Wikileaks et censé rétablir la « vérité ». Toute cette ambiance, et le fait que les leçons de cette affaire n’aient pas véritablement été tirées, donnent forcément au film un aspect profondément polémique qui n’est pas forcément utile. Et cela se cristallise en plus dans une dernière séquence absolument lunaire et dérangeante où l’on voit une fausse interview de Julian Assange qui dit que le film est faux… A ce moment-là, on rentre vraiment dans le n’importe quoi et, surtout, dans le côté très ambigu et presque malsain de tout le projet. On ne devrait pas parler de tout cela mais, au moins, ça fait un peu de choses à dire sur un long métrage finalement assez vide et, surtout, peu intéressant.

A la manière des films d’action moderne, Le cinquième pouvoir nous ballade à travers le monde : de Berlin à Nairobi, en passant par Washington, Reykjavik ou Tripoli. C’est une façon de montrer le côté international de Wikileaks et son échelle d’action (un monde global) mais, assez vite, on se rend compte que cette façon de toujours changer d’endroit a aussi pour fonction de cacher à sa manière le vide d’un scénario qui, lui-même, n’avance pas beaucoup et qui, surtout, ne s’attaque pas aux vraies questions mais fait tout pour les éviter. Ainsi, beaucoup d’artifices sont utilisés : représenter l’organisation par une grande salle remplie d’ordinateurs et de piles de papiers en tout genre, montrer une administration américaine complètement désincarnée et presque irréaliste, mélanger prises de vues réelles et images tirées des médias, faire des combines informatiques un moyen de noyer certaines images… Bref, le réalisateur (à qui l’on doit notamment les deux derniers chapitres de Twilight…) ne fait pas les choses à moitié et réalise pour le moins sans nuances, alors que, justement, un tel sujet (si récent et polémique) demandait un minimum de justesse. Le cinquième pouvoir semble vouloir être un thriller à la fois technologique et politique mais il rate sa cible des deux côtés… Le versant purement informatique est assez nébuleux et mal représenté (les programmes défilent sous nos yeux mais ne sont jamais vraiment expliqués) et l’aspect politique est très vite balayé et seulement abordé dans des grands discours pontifiants et rébarbatifs. A force de vouloir rythmer de façon artificielle une histoire qui, finalement, se passe presque exclusivement dans un monde virtuel (Internet) et difficile à filmer, Bill Condon semble avouer son incapacité à saisir le vrai sujet du film et à en faire quelque chose.

Car dans ce flot de voyages et de personnages secondaires qui s’accumulent dangereusement (au point qu’on ne sait plus à quoi ils servent), c’est bien un portrait du fondateur de Wikileaks qui est au final recherché. Et le résultat est assez gênant car, à travers ce film, il apparaît presque comme une sorte d’ange exterminateur prêt à tout (sacrifier sa vie et celle des autres en mentant et manipulant si besoin) pour atteindre la vérité. Son bras droit, lui (dont le livre qu’il a écrit a été en partie utilisé pour le scénario) passe plutôt pour une sorte de vertueux ultime, qui a toujours cherché à protéger les sources plus que tout et a fini par se désengager du combat mené par Wikileaks. Alors, où est la « vérité » ? Ce n’est pas forcément très important car Le cinquième pouvoir reste malgré tout une œuvre de fiction mais, en tout cas, la manière très caricaturale dont sont montrés ces personnages est presque choquante. Pourtant, on ne peut en vouloir aux deux acteurs principaux. Benedict Cumberbatch, dans le rôle de Assange, est plutôt bon, lui donnant volontiers un côté très énigmatique. Face à lui, Daniel Brühl est convaincant en activiste de la première heure qui, peu à peu, va voir ce qu’il croyait au départ être remis en question. Ils sont obligés de se débattre dans un scénario et une réalisation qui manquent clairement de finesse et de vision. Et ce qui est encore plus cruel pour Le cinquième pouvoir, c’est que la comparaison avec The Social Network est presque inévitable. Si le film de Fincher était moins politique, il portait aussi sur un bouleversement lié à l’informatique mais il était construit et mis en scène de manière bien plus efficace et brillante. Wikileaks n’a pas (encore) eu droit à un film vraiment intéressant sur sa naissance, mais peut-être l’aspect polémique de toute cette affaire empêchera de faire une œuvre critique avant un certain temps…



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