La Critique
Même si je n’ai pas vu le premier film qu’ils avaient déjà écrit et réalisé ensemble (Case départ), j’ai une certaine affection pour Fabrice Eboué et, surtout, pour Thomas N’Gijol. Depuis qu’il est rentré dans le Jamel Comedy Club et qu’il a intégré l’équipe du Grand Journal (à l’époque où c’était encore largement regardable), ce dernier a développé un humour qui m’a toujours plu. Et, chose assez intéressante, il s’y connaît vraiment en football. Fan du PSG, je l’ai déjà entendu tenir des discussions assez intéressantes. Ce n’est donc pas un hasard si ce nouveau film (où, cette fois-ci, il n’est ni coscénariste, ni coréalisateur mais quand même bien impliqué dans le projet) est en partie basé sur le football. Je dis bien en partie car, en fait, on comprend assez vite que ce sport n’est qu’un prétexte pour parler de l’Afrique, thème déjà évoqué dans leur premier film. Et, franchement, les deux compères s’engagent sur des chemins tout de même assez dangereux car on touche là des questions qui sont encore sensibles en France. Il n’est que voir les premières polémiques qui sont apparues avant même la sortie du film, et qui se basaient uniquement sur les bandes annonces (il est vrai assez cash), notamment sur le fait que ce film ne faisait que véhiculer des clichés sur le continent africain. Il faut bien dire que, d’une certaine façon, ce n’est pas faux car Le Crocodile du Botswanga ne fait pas les choses à moitié, dans son genre, et le film finit par s’apparenter à un drôle de numéro d’équilibriste avec un humour vraiment rentre-dedans et toujours à la limite du hors-jeu. L’ensemble donne un film où quelques passages sont assez géniaux mais dont le souci est qu’ils sont perdus au milieu d’un scénario qui ne tient pas véritablement la distance. Ca reste sacrément culotté, mais pas aussi enthousiasmant que laissé espéré un temps.
Le Crocodile du Botswanga est un film que l’on peut qualifier de corrosif. En effet, l’humour qui y est déployé n’est pas neutre. Passons sur les quelques blagues sur les footballeurs (qui sont un peu éculées) car c’est surtout sur l’Afrique en général que les scénaristes s’en donnent à cœur joie. Et ils ne font pas les choses à moitié avec des situations assez croquignolesques et des répliques parfois totalement improbables. Et oui, beaucoup de clichés sont utilisés, notamment sur les dictateurs africains et la conduite des pays sur ce continent. Ça pourrait être gênant, parce que ça ne fait pas dans la dentelle, mais d’une manière assez habile, le film réussit à se dégager de cela en rapprochant finalement cette folie du Président du Bobo du nazisme (voir la décoration de cette chambre où loge le jeune joueur de football) et non d’une « habitude africaine ». Sur les questions de colonisation, c’est aussi assez tranchant. Mais les humoristes ne s’arrêtent pas là et d’autres sujets en prennent pour leur grade, notamment les religions en général. Tout n’est pas toujours drôle, loin de là, et alors que certaines répliques valent vraiment le détour, d’autres sont plus que limites et certaines tombent même complètement à plat. Ainsi, le film est dans l’ensemble assez inégal. Surtout, c’est un long métrage qui ne tient pas vraiment la distance. En effet, il y a de très grosses chutes de rythme, notamment au cœur du film. Une fois qu’on a passé ce qui est la découverte de ce personnage haut en couleur qu’est le Président Bobo (Thomas N’Gijol se fait visiblement vraiment plaisir) et de ses habitudes, on a l’impression que le film a bien plus de mal à avancer, n’ayant plus les ressorts humoristiques nécessaires. Alors des histoires parallèles sont inventées mais elles ne vont jamais chercher bien loin et Le Crocodile du Botswanga ne séduit plus autant que dans un premier quart d’heure qui est vraiment réussi et drôle, mais dont la plupart des blagues sont dans les différentes bandes annonces. Si vous aimez l’humour bien rentre-dedans et que vous n’avez pas peur d’être « choqué » par certaines blagues parfois vraiment à la limite, vous trouverez sans doute votre plaisir. Mais seulement à certains moments, et c’est ça qui est dommage…