La Critique
Le thème de la relation entre l’humain et le robot n’est pas nouvelle au cinéma, ni dans l’art en général, loin de là. Beaucoup se sont posé la question, notamment de la place que peut prendre un robot dans la vie de quelqu’un ou de ce qu’il peut rapporter mais aussi des dangers inhérents à une trop forte présence des robots dans nos vies. C’est vraiment le point de départ du premier film de Jake Schreier qui place son intrigue dans un « futur proche », moyen assez habile de ne pas focaliser le film sur tous les changements de société possibles (le monde dans lequel ils évoluent est très semblable au nôtre) mais bien sur un seul : l’importance prise par les robots. Comme ça, au moins, le spectateur n’est pas parasité par d’autres éléments et se concentre vraiment sur la relation qu’a cet homme avec ce robot que son fils lui a imposé et dont il ne voulait pas du tout au début. Tout cela pour que l’on s’occupe de cette personne qui, sinon, passe son temps à grogner dans son coin contre tout ce qui se passe dans sa vie, sauf quand il se rend à la bibliothèque pour essayer de séduire la gérante du lieu. Bonne idée au départ, on ne peut pas le nier et quelques fils intéressants sont tirés pendant le film. Mais le problème, c’est que le scénario se perd dans des problèmes beaucoup plus parasites et, en moins d’une heure et demie, il devient très compliqué de faire un film vraiment sérieux et cohérent avec un tel sujet de départ quand s’y ajoute trop d’autres questions. Robot and Frank rejoint la longue liste des films frustrants. De ceux dont on se dit qu’il y avait vraiment beaucoup mieux à faire…
Le vrai problème de ce film, c’est que ce monde (un peu décalé) montré par le réalisateur est intéressant sur le principe mais ce dernier n’en sert pas vraiment assez, puisque le scénario décide d’explorer d’autres voix un peu moins excitantes. La relation pure entre le robot et cet homme n’est, en elle-même, pas vraiment traitée. On la voit par bribes mais elle n’est pas réellement interrogée. Il y a juste un moment décisif qui est quand Frank décide de se servir du robot pour réaliser ce qu’il a toujours fait de mieux : des cambriolages. A partir de là, ça part honnêtement un peu dans tous les sens et le scénario ne plus vraiment se contrôler. Et c’est vraiment dommage car c’est plein de promesses dans le premier quart d’heure… Après, soyons honnêtes, il y a quelques bons moments, notamment cette scène assez surréaliste où deux robots se rencontrent et leurs « maîtres » veulent les faire discuter entre eux. Discussion qui tourne court car les robots ne sont pas programmés pour cela. C’est une chouette idée, mais, là encore, pas vraiment exploitée et rangée au rang d’anecdote alors que, sur le principe, il y a vraiment quelque chose à fouiller d’une telle évolution de la société. Au niveau de la réalisation, Jake Schreier ne s’en sort pas trop mal avec quelque chose d’assez classique, mais correspondant bien au ton général du long-métrage. La musique, elle, est plutôt de qualité et bien dans le ton.
Dans le rôle de ce vieil homme acariâtre, Frank Langella est plutôt pas mal. Il est assez rare au cinéma ces derniers temps donc, autant en profiter un peu. Face à lui, seule Susan Sarandon arrive un peu à émerger, en dehors du fameux robot, bien sûr. Mais le peu de place laissé à son personnage (alors qu’on découvre quand même à la fin qu’il est plus important qu’on le croit) ne lui laisse pas la possibilité d’exprimer vraiment son talent. Les rôles des enfants, eux, sont tenus de façon correcte, sans plus, par James Mardsen et Liv Tyler. Là encore, leur rôle n’est pas suffisamment creusé pour se faire réellement une idée de leur potentiel dans un tel film. Par contre, le robot, lui, est vraiment raté et manque totalement de crédibilité. On a presque l’impression de voir le bonhomme qui se cache dans le déguisement, c’est pour dire… Tout cela est un peu à l’image de ce film, pas bête dans l’idée mais finalement un peu survolé et même parfois bâclé. Il faut parfois savoir prendre son temps et ne pas ouvrir, par son scénario, un nombre incalculable de pistes différentes quand on fait un film qui ne dépasse pas une heure et demie. J’espère que Jake Schreier saura faire mieux la prochaine fois, car ce n’est pas la réalisation en elle-même qui est en cause ici mais plutôt la façon de traiter le sujet de départ…