La Critique
Brad Anderson s’était surtout fait connaître en 2005, avec la sortie de The Machinist, film où Christian Bale perdait (déjà) plus de vingt kilos pour interpréter un homme insomniaque et paranoïaque. Hollywood refusant de financer ce projet, c’est en Espagne qu’il avait réussi à trouver de l’argent. Depuis, il s’était un peu fait oublier, réalisant deux films beaucoup plus mineurs et participant à des séries comme Alcatraz notamment. Il revient en force cette année avec un film cette fois bien produit par Hollywood et notamment par un studio qui monte : WWE Studios, qui n’est autre qu’une filiale de la surpuissante fédération de catch professionnel. Cela peut sembler à première vue un peu étrange mais cette année, par exemple, le film Dead Man Down était déjà produit par ces studios et cela s’inscrit dans la logique de participer à la création de plus en plus de thrillers ou de films d’action (pour qu’il y ait quand même une forme de logique avec le cœur de métier de la WWE). Avec The Call, ils ne se trompent pas de cible puisque c’est un vrai thriller qui nous est donné de voir, avec tous les éléments qui sont constitutifs de ce genre : course poursuite, tension, histoire louche, méchant bien méchant,… Au final, même si ce n’est pas le film de l’année et qu’il ne renouvelle en aucun cas les codes, The Call reste un film qui se laisse regarder et devant lequel on ne s’ennuie jamais véritablement. On ne demande pas beaucoup plus à un thriller, en fait.
L’idée de départ du film est plutôt intéressante : c’est de mettre véritablement en scène le 911, à travers une téléopératrice (Halle Berry, honnête). Celle-ci va véritablement voir sa vie changer par un appel et une terrible erreur qu’elle commet. Elle se verra offrir une seconde chance qu’elle fera tout pour saisir et ainsi sauver la jeune fille (Abigail Breslin, pas géniale) piégée par un terrible kidnappeur. Une grande partie du film consiste donc à un long appel entre la jeune fille et Jordan. Cette dernière lui donne des instructions pour essayer de se sauver. C’est très rythmé et le spectateur est un peu sous pression puisque, parfois, on pense qu’elle va s’en sortir et à d’autres, au contraire, que c’en est fini pour elle. Ces deux bons tiers du film font vraiment beaucoup pour la relative réussite du film car c’est particulièrement efficace et bien rythmé. La réalisation n’est pas toujours au rendez-vous (Brad Anderson aime notamment bien faire des « images par images » qui ne sont pas toujours de franches réussites), mais cela reste assez correct dans l’ensemble. Par contre, toute la partie finale, où Jordan quitte son téléphone pour aller elle-même sur le terrain mener l’enquête, est beaucoup moins bonne, notamment car elle est beaucoup moins crédible. On y retrouve un certain nombre de clichés mais aussi beaucoup d’incohérences et de coups du sort un peu venus de nulle part. La toute fin est même plus que discutable et est tellement bâclée que c’est à se demander si les scénaristes ont fait leur boulot jusqu’au bout.
Dans l’ensemble, il y a quand même dans ce long-métrage assez peu de surprises et on s’attend à la plupart des événements. En ce sens, ce ne peut pas être un vrai bon thriller qui nous surprend scène après scène. Là, c’est bien plus fléché et, finalement, alors qu’à certains moments, on peut espérer un petit twist, il n’en n’est rien. Les incohérences sont aussi relativement nombreuses dans ce film et à certains moments, on se dit que le hasard fait tout de même bien les choses… Mais, par contre, c’est d’une efficacité redoutable et c’est sans doute là-dessus que le réalisateur veut jouer en priorité. On ne s’ennuie presque pas tant on est pris par cette course-poursuite menée par téléphones interposés. Alors, en ce sens, on peut dire que c’est réussi de la part du réalisateur et, honnêtement, on oublie assez vite tous les défauts (dans le scénario ou la mise en scène) pour se souvenir de ce côté extrêmement efficace et rythmé de The Call. C’est en ce sens que c’est un film qui mérite un coup d’œil même si c’est très loin d’être le long métrage du siècle. Mais, alors que je m’attendais à quelque chose de beaucoup plus mauvais, je peux dire que j’ai été plutôt surpris positivement. Et ce n’est déjà pas si mal…