La Critique
Autant dire les choses tout de suite, car cela influe nécessairement sur cette critique : j’ai somnolé pendant une bonne première moitié du film. Il faut dire qu’il était tard et que j’étais seul dans la salle. Voilà pour les raisons « extérieures » qui expliquent ce petit somme qui ne m’a nullement empêché de comprendre ce qui était nécessaire dans ce film. Mais si je me suis assoupi, c’est aussi parce que le long métrage n’est pas très intéressant, j’en suis persuadé. En tout cas, quand j’étais réveillé, il ne m’a jamais passionné et même assez profondément agacé à certains moments. John Wells signe avec ce film l’adaptation d’une pièce de théâtre que son auteur (Tracy Letts, qui avait déjà adapté ses pièces pour deux films de William Friedkin) a lui-même réécrit pour le cinéma. Au théâtre, ça avait visiblement eu du succès puisque cette œuvre avait tout de même remporté le Prix Pulitzer de l’œuvre théâtrale en 2008. Le passage du théâtre au cinéma est souvent un exercice assez compliqué car ce ne sont pas les mêmes façons de faire et ce qui doit être volontairement outrancier au théâtre doit passer avec plus de finesse pour le Septième Art. Qu’en est-il ici ? Et bien, pour dire les choses franchement et assez gentiment, ce n’est pas la finesse qui est la plus marquante. En effet, que ce soit du côté du scénario ou du jeu des acteurs, tout est bien trop marqué. Cela donne un long métrage par moments totalement hystérique, notamment dans sa deuxième partie (c’est sans doute cela qui m’a tenu éveillé !) et globalement très décevant. En tout cas, il m’a sévèrement assommé et, étant donné que je n’ai pas tout vu (sans que cela ne me traumatise forcément, je vous rassure), je m’en vais faire une critique moins longue que d’habitude.
C’est donc l’adaptation d’une pièce de théâtre. Le souci majeur c’est que ça se remarque comme le nez au milieu de la figure. En effet, on a l’impression de voir défiler sous nos yeux les actes, les scènes, les changements de décor,… Bref, tout ce qui fait la particularité du théâtre par rapport à un cinéma qui peut se permettre d’être plus « fluide ». Parfois, c’est même tellement évident que c’est choquant. On enchaîne les scènes de dialogue entre tous les personnages, et cela dans différentes configurations (les filles ensemble, avec la mère, avec la tante,…). Tout commence véritablement avec un repas où les premières fissures familiales se font jour. Un peu à la manière de Festen, les langues se délient. Mais là où on pense que l’on va en rester à ce stade et broder autour, Un été à Osage County prend un malin plaisir à aller toujours plus loin, en multipliant les révélations et les situations dérangeantes. L’hystérie se fait de plus en plus forte au fur et à mesure que les révélations ont lieu dans de grands éclats de voix. C’est réellement fatigant et, surtout, on a l’impression de ne pas en voir le bout, ni même l’utilité, ce qui est presque encore plus grave. Clairement, c’est un film a été avant tout conçu pour que les actrices brillent et puissent, pourquoi pas, gagner des (nominations pour les) récompenses de début d’année. Et c’est réussi puisque Meryl Streep en tant que meilleure actrice, et pour la dix-huitième fois (quinzième dans cette catégorie) – ce qui est affolant – et Julia Roberts (en tant que meilleur second rôle féminin) ont eu droit à de nombreuses nominations (notamment aux Oscars) mais presque à aucune récompense. Il ne faut pas pousser non plus. Personnellement, je trouve que les deux en font vraiment des tonnes et des tonnes, en accentuant énormément leurs personnages. C’est notamment vrai pour Meryl Streep qui, dans la partition d’une mère vraiment pas recommandable, ne fait pas les choses à moitié. Julia Roberts, dans un rôle à contre-emploi (en même temps, en ce moment, elle n’a pas beaucoup d’emploi), est aussi dans une certaine forme de caricature. Il n’y a que Benedict Cumberbatch qui surnage un peu, dans un rôle qui a au moins le mérite d’être un peu plus nuancé. Mais on le voit tellement peu que ça ne compte pas vraiment. En tout cas, à la fin, on n’a qu’une seule envie : quitter cette famille de fous, certes mais qui, surtout, finit par rendre fou le spectateur.