La Critique
Ce film m’intriguait depuis que j’en avais entendu parler. D’abord, le réalisateur a un drôle de pedigree. Son dernier film réalisé est Toy Boy qui ne passe pas pour être un chef d’œuvre du Septième art. C’était la première excursion du côté d’Hollywood pour ce réalisateur britannique. Il est donc en partie excusable. Ensuite, le duo d’acteurs est constitué de deux comédiens particulièrement rares au cinéma, et notamment Eva Green qui depuis dix ans maintenant ne tourne qu’un seul et unique film par an. Ewan McGregor, lui, est plus présent même s’il garde une image d’acteur assez mystérieux. Enfin, et c’est sans doute là le plus important, l’idée de départ du film me semblait particulièrement originale et intéressante: comment le monde s’écroule peu à peu avec la perte des sens pour les humains ? Pour toutes ces raisons, il me fallait avoir ce film et j’avais la chance qu’il soit diffusé dans un UGC lyonnais (il ne bénéficie au total que de 27 salles dans le pays…). Et je n’ai pas été déçu. Car Perfect Sense est un film intéressant à beaucoup de points de vue.
C’est déjà un film qui oscille entre différents styles : romance déjà car pendant tout le film, on suit la façon dont l’histoire d’amour entre les deux personnages évolue, science-fiction puisque c’est une vraie vision de fin du monde qui est montrée avec ce long métrage. Et l’alliance de ces deux éléments pourraient donc faire pencher le tout du côté du drame. Le réalisateur ne choisit pas vraiment et c’est une des vraies réussites de Perfect Sense. Le spectateur est finalement pris par l’émotion qui résulte justement du croisement de tous ces genres. Il y a une vraie volonté dans le scénario d’être particulièrement linéaire. Il n’y a absolument aucune surprise ou rupture narrative : peu à peu, toutes les personnes perdent leurs sens, avec, en plus, des réactions extrêmes aux moments de ces changements. Tout cela a forcément un impact sur leur relation. Cette linéarité renforce le côté absolument inexorable de ce qui arrive au monde entier mais aussi à leur amour. On peut tout de même se dire que certains éléments pourraient être plus développés. Mais, ça a le mérite de se tenir et d’être cohérent.
Là où se situe l’autre réussite de Perfect Sense, c’est dans la façon dont s’instille peu à peu un véritable climat anxiogène. Certaines scènes sont vraiment prenantes car on attend de voir la réaction des personnages face aux évolutions de la maladie induite par le virus. Le Glasgow apocalyptique est, lui-aussi, parfaitement rendu. De plus, en faisant quelques séquences très rapides autour du monde (Inde, Kenya et Mexique) qui permettent de montrer la globalisation du virus, le scénario apporte une distanciation avec la simple histoire d’amour. Dans la réalisation même, on a l’impression de « sentir » la perte progressive des repères pour tous ces hommes et femmes. La partie sans l’ouïe est en ce sens plutôt réussie et prenante. Les deux acteurs principaux, sans être exceptionnels, assurent leur rôle. Au rayon des défauts à noter, on peut dire qu’il y a quelques longueurs, une voix-off parfois trop présente et une musique (pourtant de qualité et dans le ton général du film) un peu pesante. Mais, honnêtement, c’est vraiment un film qui mérite un visionnage, du fait d’un sujet initial intéressant et bien traité.