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TimFaitSonCinema
Lil et Roz sont deux amies d’enfance qui sont encore très proches la quarantaine passée. Elles vont peu à peu nouer des relations de plus en plus proches avec le fils de l’autre, au risque de s’y perdre et de détruire leur amitié…
Verdict:
Un film qui ne peut pas laisser indifférent, plus du fait du sujet que dans la façon de le traiter, somme toute assez classique et même parfois un peu paresseuse. Les deux actrices principales y sont excellentes.
Coup de coeur:

Les deux actrices principales

La date de sortie du film:

03.04.2013

Ce film est réalisé par

Anne FONTAINE

Ce film est tagué dans:

Drame familial

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 La Critique


Les films d’Anne Fontaine ne m’ont jamais vraiment fait envie. C’est un fait que je ne cherche aucunement à nier, et pourquoi le ferais-je, d’ailleurs ? Je me souviens avoir vu une partie de La fille de Monaco, sans être vraiment touché mais plutôt interloqué. Pourtant, nombreux sont ses longs métrages qui ont connu une certaine reconnaissance critique (Entre ses mains notamment). Mais, personnellement, depuis que je m’intéresse vraiment au cinéma, aucune réalisation ne m’a poussé à aller la voir, que ce soit Coco avant Chanel ou encore Mon pire cauchemar, qui, pour le coup, m’aurait beaucoup plus fait fuir qu’autre chose. Il aura donc fallu attendre qu’Anne Fontaine quitte la France pour mettre en scène son nouveau film pour qu’il y ait de mon côté un vrai intérêt pour son projet. Il faut dire que le sujet est pour le moins brûlant puisqu’on parle ici de l’adaptation d’une nouvelle de Doris Lessing (Les grand-mères), racontant comment deux femmes de soixante ans, très amies, s’éprennent de leurs enfants respectifs. L’adaptation est quelque peu différente puisque les deux mères ont ici vingt ans de moins mais le propos n’en reste pas moins particulièrement gênant. Pour monter le film, Anne Fontaine a fait très tôt appel à Naomi Watts qui, en plus d’accepter de tenir l’un des rôles principaux, a permis de trouver des financements internationaux qui font de ce Perfect Mothers un film à moitié français et à moitié australien. Il n’en reste pas moins que c’est un long métrage assez perturbant, dans la manière qu’il a d’affronter un sujet que l’on peut qualifier sans se mouiller de « pas évident du tout ».

Anne Fontaine a un immense mérite avec Perfect Mothers, celui de se confronter directement à une question quasiment tabou ou en tout cas pas vraiment facile à appréhender. Le phénomène « cougar » s’installe toujours plus et la comédie française s’en est même emparée dernièrement (20 ans d’écart) mais, là, Anne Fontaine va beaucoup plus loin puisqu’on est tout de même tout près de l’inceste. En effet, dès le départ, il nous est montré que Lil et Roz sont extrêmement proches. On les voit jeunes filles aller se baigner ensemble. Puis, en un plan, on les retrouve vingt ans plus tard lorsque le mari de Lil décède puis encore plus tard (dans le genre artificiel, on ne fait pas mieux que ce type de séquences, surtout que la même technique est utilisée pour les enfants…). Les deux sont toujours extrêmement proches ; elles sont presque voisines et ont chacun un fils du même âge qui, forcément, sont très amis et approchent gentiment de la vingtaine. Le mari de Roz part vers Sidney pour son travail, ce qui provoque encore un bouleversement. Et c’est là que va commencer à se nouer le cœur du récit. On sent peu à peu le rapprochement de plus en plus évident entre Roz et Ian, le fils de Lil. Ce n’est pas toujours très fin dans la réalisation mais, peu à peu, les choses se mettent en place de façon implacable, jusqu’à ce moment où tout bascule. Cela est renforcé par le fait qu’ils sont surpris par Tom qui, lui, va alors décider de séduire Lil… Honnêtement, raconté comme cela, je comprends que ça puisse paraître tout à la fois glauque ou digne d’une série Z. Mais avec un tel matériau, à la fois génial et particulièrement casse-gueule, Anne Fontaine s’en tire plutôt pas mal parce qu’elle réussit à plutôt bien analyser la situation et à en faire ressortir uniquement les points vraiment intéressants, bien qu’elle manque parfois un peu de distance avec son sujet.

Les dilemmes commencent en effet à se poser et l’amitié entre les deux femmes à être mise à rude épreuve, même si, finalement, ce n’est pas le plus grand problème. Ce qui est assez amusant mais aussi intéressant dans la manière d’aborder cette question, c’est que le film ne s’intéresse à aucun moment à la problématique du regard des autres sur une situation qui semble à première vue peu normale et même dérangeante. Tout reste uniquement dans le cadre du privé, presque dans un huis-clos parfois étouffant, et la période de leur relation où tout se passe bien ne nous est pas montrée puisqu’il y a une ellipse de deux ans. Ce qui intéresse visiblement Anne Fontaine, ce ne sont pas les aspects de la vie de tous les jours mais bien plus les questions complexes qui se posent sur deux axes à la fois différents et complémentaires : la mise en place d’une forme de « ménage à quatre » assez malsain sur le principe et la problématique de la différence d’âge. C’est sans doute celle-ci qui est la mieux traitée car on voit bien comment ces deux femmes, alors qu’elles sont attachées à leurs amants, se rendent compte dès le départ que leur histoire ne pourra pas durer dans le temps. Il y a là quelque chose de presque déchirant, notamment chez Lil, dans cette manière de prendre conscience de cela mais d’avoir du mal à l’assumer quand la réalité la rattrape. Ce qui est aussi intéressant, c’est la façon dont les lieux ne sont jamais utilisés par hasard : ils ont un vrai sens, notamment ce petit passage vers la plage où l’on voit les deux amies y passer à différentes périodes (de l’enfance à l’âge adulte) et dans des configurations toujours différentes : seules, en couple, avec petits enfants… Il en est de même pour ce ponton qui est une sorte de jardin secret pour les deux femmes et qui devient finalement le symbole de ces couples.

Pour jouer ces deux femmes, qui sont véritablement les points centraux de toute l’histoire, Anne Fontaine peut compter sur deux très bonnes actrices, à savoir Naomi Watts, particulièrement impliquée sur le projet, mais aussi Robin Wright. Pour elles, cela n’a pas du être facile car ce sont loin d’être des rôles évidents et le rapport à l’âge y est très important et c’est une question qui se pose nécessairement pour les actrices ayant dépassé la quarantaine aujourd’hui à Hollywood. Mais elles sont excellentes, parfait mélange de force et de faiblesse. Pour ce qui est des deux jeunes, j’ai été beaucoup moins convaincu et je les ai même trouvé parfois assez limite… Perfect Mothers ne peut laisser indifférent le spectateur car il y a un aspect moral extrêmement important. Personnellement, cela m’a mis mal à l’aise car c’est montré de telle manière que l’on pourrait penser à une vraie situation d’inceste. Il y a avec un tel sujet tout pour que ce soit particulièrement casse-gueule mais Anne Fontaine évite un certain nombre de chausse-trappes. Pas tous, malheureusement, puisque sa réalisation a tendance à un peu trop insister sur les visages, parfois à la limite du trop-plein. Elle a aussi certains vrais tics de mise en scène qu’elle nous ressort assez souvent et ça en devient agaçant. Mais elle conduit plutôt bien l’ensemble du film, en gérant le rythme, bien que le tout manque un peu parfois de densité (certaines séquences s’étirent un peu trop ou se répètent) et il se dégage véritablement quelque chose de son film, qui tient sans doute davantage au sujet même qu’à la mise en scène. On n’en ressort en tout cas pas vraiment comme on y est rentré, et c’est aussi parfois le rôle du cinéma.



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